dimanche 6 avril 2008

A qui se fier quand les aliments font peur ?















L
e pouvoir de « décontamination symbolique » des supermarchés au Vietnam


Contexte de Hanoi, Vietnam

Fin des années 80 : Adoption de la politique dite du Renouveau

- Un taux de croissance annuelle de l’ordre de 7%
- Le marché de l’alimentation a doublé en 10 ans (Moustier et al 2003)
- L’ensemble du système alimentaire est affecté par ces évolutions

« ensemble des structures technologiques et sociales qui, de la collecte, jusqu’à la cuisine en passant par toutes les étapes de la production–transformation, permettant à l’aliment d’arriver jusqu’au consommateur et d’être reconnu comme mangeable », Poulain 2002

Du magasin d’État à l’hypermarché

Abondance et « modernisation » du système de distribution

- 1986: autorisation de l’entreprise individuelle
La production vivrière connaît une forte croissance
Ex: le riz

- Le commerce individuel se développe
Réseau de magasins d’État, système de tickets de rationnement, pour gérer les pénuries alimentaires
Maillage dense de vendeuses ambulantes, marchés de plein air, et échoppes « marchés spontanés »

- Années 90: implantation dans les principaux centres urbains
Aujourd’hui < style="font-weight: bold;">Résidus de pesticides, grippe aviaire: des risques alimentaires nouveaux

- Usage massif de produits chimiques
Pour intensifier la production vivrière
Engrais, pesticides, produits de conservation,… mal maîtrisés

- Cas nombreux d’intoxications alimentaires
Enquête menée à Hanoi en 2002: 60% des personnes interrogées considèrent que les aliments commercialisés présentent aujourd’hui un risque pour la santé, le danger principal étant associé à la présence de résidus de pesticides dans les légumes (Figuié, 2004a)

- Grippe aviaire, depuis fin 2003
Intensification des échanges à l’échelle nationale et internationale: expansion du virus

- Sentiment d’anxiété alimentaire parmi les consommateurs
Non atténuée par les systèmes de contrôle sanitaire gouvernementaux

Des contrôles sanitaires peu fiables, des signes de qualité peu crédibles

- Peu de confiance dans les systèmes de contrôle mis en place par l’État
Seules 5% des volailles mises sur le marché à Hanoi seraient contrôlées
Le tampon même quand il est présent est peu crédible (Ghinoux, 2001)


Certificat de contrôle des poulets






















Mise en place dès 1995 du programme de "légumes propres", par le Comité populaire de la ville de Hanoi

- Vise à certifier une production de légumes

- Là encore: contrôles peu nombreux, consommateurs très peu confiants. le label « légumes propres » apparaît comme manquant de crédibilité (Moustier et al 2006b)

Label « légumes propres »















- Certificat inutile, selon certaines vendeuses (entretiens avec des vendeuses du marché Long Bien, 30 janvier 2004)

- Des acheteurs très confiants dans la qualité sanitaire des légumes vendus en supermarchés, convaincus que les légumes y sont des « légumes propres » même si aucun label ne l’indique (Figuié, 2004b)

- Le lieu d’achat (vendeuse habituelle, supermarché) peut être de nature à rassurer le consommateur sur la qualité des produits, soit qu’il appuie le signe de qualité, soit qu’il s’y substitue
Résultats 1Enquête qualitative 2Enquête quantitative

Le mode de distribution comme garantie sanitaire
1 Représentations des consommateurs des modes de distribution, des labels et des contrôles sanitaires

Le supermarché: représentations













Discours rapportés lors de 30 entretiens semi directifs

« Chaque fois que je vais au supermarché je suis assurée, je peux choisir n’importe quoi. »

« J’ai une grande confiance dans la qualité sanitaire »

Grande structure = Responsabilité accrue

« Au supermarché, ils investissent beaucoup, ils choisissent leurs fournisseurs et ne peuvent pas mettre n'importe quoi. »

« Ce sont des grandes structures. Elles ont de la visibilité, elles sont internationales. Elles suivent des règles internationales. »

« Les produits des supermarchés sont plus fiables. Car il faut garder le prestige. Les acheteurs du supermarché sont plus nombreux que les acheteurs des marchés. S'il y a une intoxication alimentaire, cela touche beaucoup plus de personnes. Le supermarché a plus de responsabilités vis à vis des clients. »

Représentations des contrôles sanitaires

Des représentations plus ou moins proches de la réalité
« De plus il y a toujours un service de contrôle du supermarché en plus du service de contrôle de l'État. »
« Au supermarché, en plus, il y a un service avec des gens qui contrôlent et vérifient la qualité. »

Remise en cause de l’efficacité des contrôles
« Dans les petits marchés d'abord il y a moins de contrôles, et ensuite, les inspecteurs, s’il y en a, ne travaillent pas beaucoup. Ils sont là et ils laissent faire! »
« Au marché Hom, après avoir enlevé des plumes, on tamponne, voilà on ne peut pas avoir confiance. »

Le mode de distribution comme garantie sanitaire 2 Confiance des consommateurs dans la qualité sanitaire, selon le mode de distribution

Questionnaire N=707
- « Pouvez-vous, s’il vous plaît, donner des notes, en %, sur votre propre niveau de confiance dans la qualité sanitaire des légumes vendus dans les endroits suivants: marché spontané, marché officiel, supermarché? »

- Cas où le produit est porteur du label « propre » / Cas où il ne l’est pas

- Mesure de l’impact plus ou moins fort du mode de distribution sur la confiance dans la qualité sanitaire + Comparer à l’impact du label « propre »

Confiance dans la qualité sanitaire des légumes non porteurs de labels "propres" N=507












Confiance dans la qualité sanitaire des légumes avec/sans labels "propres" N=507

Une confiance sur le lieu de vente, quand on introduit le label













- Augmentation de la confiance quelque soit le lieu de vente
- Confiance croissante du marché spontané au supermarché en passant le marche officiel avec et sans label
- Dans les situations extrêmes, de très faible ou très forte confiance, le label a un effet moindre
- Avec ou sans label, le marche spontané reste le lieu de moindre confiance
- Et Le supermarché reste le lieu de confiance maximale

Une confiance sur le lieu de vente, quand on introduit le label

- Faible impact du label propre sur la confiance des consommateurs dans la qualité sanitaire des produits vendus
- Le supermarché semble se suffire à lui-même pour donner confiance aux acheteurs

Variation de confiance Avec/ Sans label La même pour tous les individus?

Nuage de confiance qualité légumes avec/sans label "propre" au marché officiel N=507

















Nuage de confiance qualité légumes avec/sans label "propre" au supermarché N=507


















Consensus / Diversité de confiances


- Dans les deux cas la confiance du label permet d’augmenter la confiance des répondants

- Les légumes porteurs du label au marché inspirent des niveaux de confiance très divers: le nuage de points est plus étalé alors qu il y a un consensus sur la qualité des légumes avec sans au supermarché

Limites

- Comparaison de catégories institutionnelles: négligence d’autres points d’appui de la confiance
- Confiance interpersonnelle non prise en compte (proximité entre vendeurs et acheteurs)
- Considérer comme lieu de vente «votre vendeur habituel »
- Biais de l’ordre des questions

Le pouvoir de « décontamination symbolique » des supermarchés au Vietnam
Pensée magique et décontamination symbolique


- Confiance ne repose pas sur l’expérience des consommateurs

- 1% Vietnam, 5% milieu urbain

- 3/4 échantillon « jamais, quelques x / an »

- Ne repose pas sur des données objectives sanitaires
- - > La confiance accordée aux supermarchés par les consommateurs vietnamiens dépasse le cadre de la pensée rationnelle du mangeur

- Référence à la pensée magique (Fischler 1994, Rozin 1994, Chiva 1994)
« la pensée magique longtemps considérée comme une des caractéristiques de la mentalité primitive apparaît comme un mode de fonctionnement normal de la cognition alimentaire cohabitant avec la pensée rationnelle chez le mangeur contemporain » (Poulain 2002 : 175)
- Pensée magique à l’œuvre dans les processus de contamination symbolique décrits par Rozin (1994)
Lorsque deux entités sont en contact, des propriétés sont transmises entre elles de façon définitive ; ainsi un verre de lait dans lequel a baigné un cafard, même après stérilisation reste « imbuvable » aux yeux de la plupart d’entre nous

Achat et alimentation: fondateurs d’une identité collective

Un aliment - - - - - - - - - - - - - - - - >La table du consommateur
contribue à la définition de sa qualité, même si cela n’affecte pas les caractéristiques intrinsèques du produit final

- Potentiel de « décontamination symbolique » de certains éléments de la filière du supermarché

- Le supermarché au Vietnam: des symboles
Accès du pays à l’abondance après la pénurie
Accès au luxe après la sobriété
Accès au monde après l’enfermement culturel

- L’acte alimentaire est fondateur de l’identité collective ou de l’appartenance sociale (Bourdieu 1979, Poulain, op.cit.,), selon l’adage « je deviens ce que je mange »
- - > L’acte d’achat est également fondateur de l’identité collective

St Louis, l'un des plus grands carnavals des US

CE QUE VOUS DEVEZ SAVOIR POUR VIVRE LE MEILLEUR DU CARNAVAL DE ST LOUIS

- Le carnaval se déroule chaque année dans le quartier de Soulard, au cours des deux dernières semaines qui précèdent le mardi gras.

- Pour avoir une bonne vue de la grande parade qui débute à dix heures, mieux vaut arriver une heure en avance.

- Ne pas oublier d’expérimenter les variétés de viandes cuites au barbecue emblématiques de l’événement : les hot dogs de la paroisse, les brochettes de Soulard, et surtout l’impressionnante cuisse de dinde grillée.

PETIT LEXIQUE A L’USAGE DES NON INITIES

- Fat Tuesday: aux Etats-Unis, on parle de « Mardi gras » sans trop savoir de quoi il s’agit. « Fat Tuesday » (traduction anglaise de Mardi Gras), est le jour de pléthore alimentaire, qui précède le mercredi des cendres et le jeûne de quarante jours dans la religion catholique.

- Beads: les colliers de Mardi Gras. De couleurs verte, violette ou dorée, ils sont lancés à la foule du haut des chars

- Krewers: ces personnes se sont réunies pour décorer un char. Les « krewers » défilent et lancent les « beads » à la foule.


« J’ai participé à l’un des plus grands carnavals des Etats-Unis »

A St Louis, comme à la Nouvelle Orléans, se déroule chaque année le festival de Mardi Gras.

En rejoignant mes amis là-bas, j’ai en tête la catastrophe de Katrina, qui six mois auparavant a jeté un voile noir sur l’Amérique entière.

Cette année, lors des céléblrations de St Louis, les habitants vont-ils porter un deuil symbolique?

A peine suis-je arrivée en ville que mes amis me conduisent dans le quartier de Soulard, où se dérouleront les défilés. Il fait nuit, les stands de rues et les chapiteaux prévus pour l’occasion sont déjà en place, mais vides, ils donnent l’impression d’une ville fantôme. C’est en entrant dans les bars et les pubs que je sens la frénésie festive : la plupart des clients ont revêtu les chapeaux et colliers récoltés l’année passée.

Le lendemain matin, a peine dehors, nous nous faisons entraîner par la marée humaine qui se dirige vers la parade. Au bord de la route, surélevée sur un échafaudage, je peux observer la foule plutôt jeune, déguisée, et parfois composée d’enfants. Je distingue au loin les chars. Lorsqu’ils s’approchent, les colliers volent vers l’assemblée. Une fille perchée sur des épaules dévoile alors son torse aux lanceurs. Aux Etats-Unis, se dénuder est un tabou et Mardi Gras, tout autour du monde, est synonyme de dépassement des interdits propres à chaque culture.

Après la parade, un concert débute sous le chapiteau. Les chansons des années 70 nous acccompagnent tandis que nous nous allons de maison en maison. Les propriétaires ont organisé de petites fêtes. Ils sont d’autant plus heureux d’accueillir des inconnus chez-eux que ceux-ci sont couverts de colliers.

A dix-neuf heures, le concert terminé, la foule et les amis fatigués se dispersent jusqu’au mardi suivant, pour la parade finale, qui parachève ce Mardi Gras festif, et surtout pas passif, à Saint-Louis.




1. Bien que peu de gens connaissent la signification de ces deux mots, « Mardi gras » est inscrit partout dans la ville.

2. La veille de la grande parade, dans les bars et les pubs du quartier, la plupart des clients ont déjà revêtu les chapeaux et les colliers récoltés l’année passée.

3. Deux cents mille personnes se sont réunies pour la parade. La foule attend l’arrivée des chars.

4. Les colliers sont lancés du haut des chars à la foule par les « krewers », les personnes qui ont décoré les chars.

5.6. Parmi les spectateurs, certains se démarquent par l’imagination dont ils ont usé pour se déguiser.

7. L’après midi de la grande parade, les propriétaires des maisons du quartier ouvrent leurs portes aux gens, si bien que la fête se déroule aussi bien dehors qu’à l’intérieur.